Le jeudi 16 décembre 2004 |
Photo Rémi Lemée, La Presse |
Purewal Jasvir, propriétaire du resto indien Tandoori Xpress |
Sur le pouce
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Lilianne Lacroix
La Presse
Ils avaient fait imprimer 50 000 menus qu'ils avaient voulu parfaits pour leur clientèle lavalloise. Seulement, ces menus ne leur avaient valu que des critiques ou, au mieux, des sourires amusés.
Il faut dire que c'était là une pièce d'anthologie, avec ce genre de perles que seules des personnes totalement ignorantes du français peuvent pondre en compagnie d'un logiciel lâché lousse, des incongruités du genre «d'un rouge ardent portez sauce» ou cette autre sauce avec «aider généreux du gingembre»...
11Parce que la bouffe est très abordable et absolument succulente, parce c'est sûrement le seul restaurant indien des environs et parce que les clients voyaient le proprio indien Purewal Jasvir et ses employés pakistanais pleins de bonne volonté mais absolument catastrophés par l'ampleur des dégâts littéraires, de nombreuses personnes revenaient au Tandoori Xpress. Mais elles ne pouvaient s'empêcher de bitcher un peu le menu bizarroïde distribué dans tout le voisinage.
La semaine dernière, après six mois d'activité, ils ont finalement fait une croix sur leur investissement, jeté ce qui restait des 50 000 dépliants et lancé un nouveau menu pratiquement impeccable, qui fait enfin honneur aux mets qu'ils préparent amoureusement.
Le cuisinier Waseem Ishaq, d'origine pakistanaise et arrivé ici comme réfugié politique il y a quelque neuf ans, parle de chacun comme d'une aventure amoureuse: «Ah oui! Vous avez pris les légumes Tandoori. J'adore préparer ce plat; à elle seule, l'odeur qui s'échappe alors du four me met en appétit.» Il viendra d'ailleurs déposer en personne les légumes fumants sur la table.
Ressemblant à un corridor flanqué de banquettes, jouxtant un dépanneur avec lequel il forme un mini-centre commercial, le resto ne paie vraiment pas de mine, mais tout y est extrêmement sympathique, des nouveaux menus jusqu'à ces minuscules bonbons-vermicelles au fenouil qui servent de digestif.
Comme ses collaborateurs Arshed Mehmood et Farid Masroor, M. Ishaq, qui tente d'apprendre le français avec ses deux fils, est un peu étonné de ce penchant des Québécois pour la cuisine épicée: «Nos clients sont à 99,9 % francophones et ils adorent les mets très, très relevés. Même moi, je ne pourrais pas les manger.» Il s'empresse toutefois d'ajouter: «Mais dites bien aux gens que toute la cuisine indienne n'est pas aussi épicée. Seulement quelques mets le sont; les autres, tout le monde peut les manger, y compris les enfants